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Chroniques en Vrac
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  • Pour partager mes préférences musicales sous forme de chroniques semi-hebdomadaires, de coups de coeur en coups de gueule ; un intérêt certes limité, mais qui pourrait peut-être se révéler utile, à vous comme à moi.
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Chroniques en Vrac
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28 mai 2007

Keiji Haino - 慈

haino_affectionEncore lui ? Dame oui, sacré tir groupé de chroniques car autant le faire savoir, j'ai bien l'intention de me lancer corps et âme dans la discographie de ce monsieur depuis que j'ai découvert ses albums studio et par là quelques points communs qui le rendent encore plus sympathique à mes yeux. Affection n'est pas choisi au hasard, je pense sincèrement avoir trouvé un nouveau Graal, un album depuis peu inhérent à ma fiche d'état civil et à citer dans mon CV dès aujourd'hui. C'est d'ailleurs pourquoi je ne résiste pas à l'envie d'en parler sur ce blog, même si une fois n'est pas coutume, je vais passer pour le péteux de service.

Paru en 1992 sur PSF, Affection témoigne sans douleur de la douceur d'un artiste unique. Si Thurston Moore est très certainement à l'origine de l'avènement de Keiji Haino - et de la pluie d'albums qui a inondé de références le label japonais, cet album de 1992 offre une heure de compositions folk expérimentales qui invitent plus à une certaine contemplation qu'à une agitation forcenée. Si beaucoup peuvent prendre à la légère les travaux de Haino, il faut souligner que nombre de ceux qui ont fait l'effort d'écoute ont été surpris. Quant à ceux qui l'ont déjà vu évoluer sur scène, ils ne peuvent que se permettre d'établir des liens élogieux entre le pape de la japanoise et différents piliers de la musique d'avant-garde improvisée.
Keiji Haino, au-delà de la guitare, possède 80 instruments à son actif : vielle et divers instruments traditionnels, batterie et percussions, saxophone, beat box, platine et outils électroniques ne forment qu'une partie du paysage musical d'un corps intégralement abandonné à la performance, poursuivant ses objectifs en privilégiant une approche presque religieuse, comme un Coltrane de la noise. Une définition pompeuse ? Pas tellement. La richesse de cet artiste s'étend aussi dans son nombre incroyable de projets, que ce soit avec ses pairs (Yoshida Tatsuya, Boris, Shoji Hano, KK Null et des projets comme Fushitsusha, Knead ou Vajra) ou en collaboration avec des pointures occidentales (Christian Marclay, Derek Bailey, Peter Brötzmann, Bill Laswell et autres John Zorn). Des crédits messianiques qui le placent directement dans les grands favoris de l'underground free.

Affection donc, n'est pas album à être entendu d'une oreille distraite. Il est force de proposition, sujet à question et objet de révélation. Une heure de boucles de dark folk durant lesquelles Haino apparaît comme un songwriter de l'ombre aux pouvoirs hypnotiques ; comme à son habitude, le tout est interprété live pour toucher au réel musical. Le son qui s'échappe de cet enregistrement donne une résonance particulière à l'ensemble, que ce soit conceptuel ou sonore. Résonance du concept puisque l'album peut se découper en plusieurs morceaux de structures similaires ; résonance des boucles ; mais surtout résonance sonore par cet effet d'écho qui donne la sensation d'assister à une répétition avant un concert ; choix judicieux et habituel (cf. Tenshi Ni Gijinka), puisqu'il place inconsciemment l'auditeur comme témoin privilégié d'une salle de concert vierge. Le son concentre notre attention et la musique capte notre affection.
Une des grandes idées de Haino consisterait à bannir sur une île déserte les artistes qui s'éloignent toujours de leurs sensations en ajustant le volume à des niveaux sonores toujours plus calmes et silencieux, sans laisser échapper leur tension. Outre son caractère provocateur, cette vision colle tout à fait à l'esprit de Affection ; preuve en est, il parvient à concilier de longues plages contemplatives éclaboussées de sa voix avec des instants bruitistes écourtés, le tout sans gâcher l'évolution même de la musique. Mieux : ces brèves nuées immatérielles font office d'élément clef d'une suite logique.
Car il faut aussi savoir que Keiji Haino reste avant tout un performer qui rappelle les joutes hendrixiennes enflammées et les élucubrations corporelles d'un iguane période Fun House ; il n'est donc pas dénué d'un genre de sensualité au-delà de son apparence sobre. Le message implicite est tout aussi sexuel et l'instrument phallique. Cependant, ici pas d'orgie sonore, mais une retenue d'une douceur exceptionnelle, une bande son érotique dont les envolées nerveuses séparant chaque partie apportent une sensation différente de celle d'un guitar hero noise.
Rien ne cache que Haino prend du plaisir, il laisse jouir sa guitare dans un éclat de bruits court et intense. Et le fait de limiter ses conclusions séminales n'est pas étranger à cette plénitude extasiée qui voile l'ombre d'un rideau pudique, loin de toute gratuité, loin de toute pornographie bruitiste qui n'aurait ici qu'un effet fade et malvenu.
Tissé de sonorité médiévales et cousu de timbres délicats, l'enregistrement sentimental se révèle être une écoute salutaire, la pénombre cachant une lumière qu'un fou de musique tente de libérer.

Affection demeure incontestablement un favori malgré l'exploit de 1981, un Harvest noir et halluciné comme épisode charnière d'une carrière protéiforme.

Note générale : 19,99/20

*** Si vous aimez, essayez... ***

Keiji Haino - Tenshi No Gijinka
Keiji Haino & Peter Brötzmann - Evolving Blush or Driving Original Sin
Derek Bailey & Keiji Haino - Songs

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Commentaires
J
C'est vrai que la pochette est magnifique! <br /> Il y a de cela un an j'ai eu un choc lorsque j'ai découvert "Purple Trap". Keiji Haino, Bill Laswell et Rashied Ali: un groupe monstrueux. Et Keiji va a toute blinde, sans arrêt! Il n'a jamais peur, c'est incroyable!<br /> As tu écouté le disque du duo de choc (mais qui du coup attention peut être décevant) Keiji Haino + Merzbow? Et donc le duo Bailey/ Haino est chouette aussi?
B
Eh ouais Moon, il a la classe ce skeud ;)<br /> <br /> Quant à Johnny Depp j'avais pas franchemenr remarqué mais pourquoi pas arf.<br /> Certainement à suivre !
N
Alors là, la ressemblance avec Johnny Depp dans Charlie et la chocolaterie est frappante ! Les cheveux juste plus longs mais la même mèche, des lunettes semblables, la tenue très proche et ce petit sourire en coin que l’on sent malgré son absence physique.<br /> Je me contente de décrire son apparence parce que je ne connais pas le Monsieur.<br /> A suivre…
M
Je le veux!
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