After Dinner – Paradise Of Replica (Paradise Of Remixes)
D'aucuns
pourraient prétendre que je suis (ndlr : j'étais...) dans une période
japonaise. A ceux-là, je tiens à leur préciser
que je répondrais impérieusement, et sans aucune
hésitation : « ...oui, et alors ? ».
Parce que c'est tout bonnement le pied ! D'abord de par l'originalité
des compositions, la nature des structures, mais surtout par la
redécouverte de tout un pan de la musique. S'intéresser
un minimum à l'histoire de la musique japonaise « moderne »
(j'entends par-là depuis leur ouverture sur le monde et, il faut l'avouer, leur
occidentalisation) est un acte fondamental pour comprendre le
glissement progressif depuis l'avant-garde d'hier à la musique
nouvelle qu'on connaît aujour'dhui. After Dinner demeure pour
certains une icône de la musique nipponne, une référence
indubitable ; il est donc tout à fait normal d'avoir droit de
nos jours à une réédition de Paradise Of
replica, incluant quelques petits remixes.
Précisons
avant toute chose que After Dinner est un groupe à part
entière, que l'on pourrait classer rapidement et sans
réflexion comme un ovni de plus dans le paysage musical des
lointaines contrées du pays du soleil levant. Certes, à
ceci près que la grande réussite de Haco, chanteuse et
leader féminin du groupe, a été de rester fidèle
aux racines traditionnelles de son pays, nous délivrant ainsi
une sorte de pop wold music éthérée, un
patchwork unique dont s'inspireront quelques artistes - les premières
écoutes rappellent étrangement certains travaux de
Björk. C'est palpable notamment sur leur premier opus, le
fameux album éponyme sorti en 1984 : une bonne longueur
d'avance pour un groupe relativement éphémère.
Paradise
Of Replica est leur second album studio, sorti cinq ans plus
tard, avec un label différent, un style plus net et un line
up complètement réassorti (seuls subsistent Haco et
Tadahiko Yokogawa). Ponctuant déjà la carrière
du projet, l'album n'en est pas moins très bon ; un jouet
déglingué à la mécanique d'horloger, une
petite poupée désenchantée au charme fou, qui
rappelle sans mal celui de Togawa Jun ; mais ce brin de sensualité,
un style reconnaissable entre milles, c'est aussi un langage aérien,
imprévisible, qui prend tout son sens dans cet univers
impressioniste ; comme une Kate Bush orientale, qui sait s'entourer
autant d'éléments mélodiques complexes et
fouillés, que d'une dimension percussive très riche.
La seconde moitié de l'album constitue la
partie la plus poussée et la plus intéressante, à découvrir d'urgence pour sa phase expérimentale plus poussée, qui marque un changement des variations électroniques pour garantir des effets mélodiques saisissants ; ce qui place d'office la création de 1989 dans la catégorie de l'avant-prog chez les amateurs d'outratlantique.
Le
temps passe vite dans ce cocktail doux comme l'abricot, rouge comme
la cerise et acide comme le citron... si vite, qu'on saisit forcément
l'intérêt premier des remixes : leur présence
motivée par le souci de transformer Paradise of Replica
en un petit chef-d'oeuvre... un tantinet plus long !
De
grâce, ne prenez pas peur : la qualité n'en est pas
amoindrie, les mix sont plutôt bien pensés et se
laissent parfaitement écouter, alors que l'envie vous prend de
regarder un peu le mini-poster joint dans cette édition, qui
propose les lyrics en japonais et en anglais.
Finalement, Paradise of Replica est bien de la même trempe que son prédécesseur, malgré un son beaucoup plus soigné ; personnellement mon préféré des deux, bien que je n'ait pas encore écouté le Live Editions – qui à l'instar de Paradise of Remixes a été rajouté à la nouvelle réédition du premier album, pour le plus grand bonheur des fans. C'est donc un grand dommage que l'écoute soit limitée, on jurerait assister à un témoignage de mort prématurée... Haco aura sa résurrection dès 1995, en langant sa carrière solo ; mais d'après certains, on atteindra rarement un aussi bon niveau d'expérimentation progressive au subtil parfum évanescent de pop traditionnelle.
Sans aucun doute, à conseiller à ceux qui ne craignent pas de passer du bon temps avec les artistes féminines aux pérégrinations sonores un peu spéciales.
A
noter, une compilation de raretés est apparemment sortie sous
le nom de Glass Tube en avril 2005.
Note générale : 17/20
*** Si vous aimez, essayez... ***
After
Dinner – After Dinner
Björk
– Homogenic
Laurie
Anderson – Big Science