Café Flesh – This is not an Amrep Christmas Show...
C'était la découverte de l'année 2007, précisément. Je croyais avoir trouvé la petite perle méconnue, au hasard sur Internet, un petit groupe français surgi de nulle part et qui envoyait du petit bois, en plus ; mais après m'être intéressé à la pochette, déception. Figure le nom de Bilou et, après vérification, Tanxxx en fait aussi régulièrement l'éloge. Nextclues m'a encore devancé, et de loin. Bordel, c'était trop beau pour être vrai, comment je vais me passer les nerfs pour me calmer ? Allez tiens, zou on relance du Café Flesh, ça sera très bien.
Jarnac, 4817 habitants. Entre Saintonge
et Angoumois, à plus de 450km de la capitale a été
créé il ya quelques temps maintenant un produit de
campagne bien spécial : un regroupement de fans de noise punk,
d'Amrep et de ses Cows au nom sonnant bien underground made in NYC à
la Unsane : Café Flesh. Certains préciseront que c'est
aussi le nom d'un porno, ce qui promet donc un petit remontant bien
dosé... des trublions sexy aux bombinettes en tube(s) aux
effets aphrodisiaques, en somme !
Les cinq charentais nous délivrent
un album qui n'en est pas un, puisqu'il s'agit d'un live compilé
en mp3 téléchargeable pour peanuts sur le site du
groupe, une véritable aubaine donc, cliquez sur le lien sans
tarder ou vous mourrez d'un cancer des testicules sous les 30
prochains jours. Le titre est bien choisi, puisqu'on s'attend à
du lourd (et à quelque chose comme un album promo d'Unsane
justement).
Je place direct que c'est une bombe. En
une dizaine de compos efficaces, le groupe parvient à nous
persuader de ses capacités gonflées d'influences bien
choisies, Chokebore et Jesus Lizard en tête. On nage donc en
plein dans les 90s avec une fraîcheur qui fait plaisir et
quelques bonnes idées en prime! Si ça c'est pas le
pied, les mecs. Go !
L'enregistrement commence par Jesus a
Retrouvé son Lizard, qui plante le décor à
grands coups de maillet. Quelques secondes suffisent à Café
Flesh pour faire une bonne entrée en scène, du noise
couillu qui rend bien sûr hommage au groupe de David Yow ; tout
y est, le bouillonnement latent, la petite pause au milieu pour mieux
reprendre et enchaîner avec une petite montée en
puissance, bref, on entame le concert dans de bonnes conditions.
Better Sweat suit la cadence, le premier son rappelle US Maple mais
il est bien vite emporté par la rage noisecore, et là
je m'arrête une seconde ; le groupe a un saxophoniste (bel
outil technique), et il utilise son instrument de la même façon
que We Insist! (cf. chronique), mais... en mieux. Eh ouais, là
il n'y a pas de côté émo, ça transpire
pendant 2 minutes 30, on va droit au but avec une énergie
renouvelable, pour un morceau bien vif.
_______ le succède (curieux titre, non
?) avec une intro limite stoner bientôt déchirée
par une fureur aussi anticipée qu'un bon coup de troisième
jambe là où il faut sans préliminaire, oui c'est
cru et ça fait hurler le saxophone de douleur en cris
suraigus. On retrouve un schéma similaire avec Over Me dont le
final ne manque pas d'éparpiller nos bouts de cervelle dans un
coin de la salle, puis It's Time to Call Pamela (spéciale
dédicace à Pamela Anderson), compo qui balance
vraiment, on sent Amrep partout jusqu'aux petits obus de désert
bluesy creusés ça et là dans un vaste champ de
bataille noise.
C'est avec Plumber et Respiretory
Equipment qu'on se rend compte que Café Flesh n'est pas que de
la dynamite qui explose au toucher, mais aussi un groupe qui sait
installer des plans efficaces de manière moins brutale : le
premier commence avec un saxophone baryton qui simule un effet de
distorsion, comme un riff de gratte enrhumée qui s'emballe
dans un pont très entraînant ; le second confirme la
tendance d'un saxophoniste en forme qui finit sa course dans un sacré
jam. C'est crade, c'est splendide, c'est du talent à l'état
brut.
Alors que I'm So Excited semble
parodier un tube de Blur, la prochaine - qui est pour Philippe -
permet peut-être d'avancer l'hypothèse que c'est ce
gratteux qui gère les groupies en coulisses (me demandez pas
pourquoi). Café Flesh s'évertue alors à jouer
une reprise des Cows, puis termine le concert avec un rappel
moyennement enthousiaste qui introduit Arizona à la setlist,
compo sortant un peu de leur comportement punk pour quelque chose de
plus expérimental et lancinant. Le baryton laisse sonner une
nouvelle fois son joli vibrato comme un fil rouge, dommage cependant
qu'il faille attendre le milieu du morceau pour obtenir quelques
notes suraigües biens senties (pas encore assez nombreuses, ces
petites digressions, ma foi). Qu'importe, les guitares tailladent
sec, la basse ronronne comme au bon vieux temps, la batterie emboîte
le pas et il n'y a rien à redire. De toute façon on
nous dit clairement de nous fermer notre putain de gueule, même
si on n'est pas de l'Arizona mais plutôt du trou du cul du
monde.
Le concert se termine ainsi, après 35minutes de pure déflagration maîtrisée, comme prière au label adoré qui a vu passer Boss Hog, Bush Pig, Tar, Helmet, Melvins et bien d'autres. Café Flesh réussit à merveille et côtoie désormais les Lyonnais du groupe Ned dans les petits groupes favoris de mon esprit. Tout fan de noise qui se respecte se doit d'écouter ce live, le jeu en vaut la chandelle... ils font passer We Insist! pour des gamins has been.
Un bon terroir provincial qui fait passer au tiroir la spécialité parigote. De quoi redonner espoir aux gars reclus dans une enclave comme l'Auvergne peut en être une. De la musique charentaise pas pantouflarde pour un sou !
Note générale : 17/20
*** Si vous aimez, essayez... ***
Cows - Cunning Stunts
Chokebore - A Taste for Bitters
The Jesus Lizard - Down